2017

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Révolution bourgeoise

L'histoire des révolutions bourgeoises



Il existe plusieurs types de révolutions bourgeoises.

Le capitalisme est apparu il y a plusieurs siècles en Europe. Le développement du monde inégal, cela signifie que l'histoire ne suit pas le même chemin partout, n'évolue pas à la même vitesse partout.

Des embyrons de capitalisme avaient existé dans les premiers empires de l'antiquité, en Grèce, à Rome, dans l'empire arabe, dans l'empire byzantin puis ottoman. Mais ces embryons n'ont pas débouché sur le capitalisme moderne pour des raisons différentes. La principale raison est qu'il fallait d'abord une accumulation primitive, que la découverte de l'Amérique et l'esclavage de masse a permis. Le capitalisme est d'abord apparu en Italie, en Hollande, puis dans le reste de l'Europe, puis il s'est répandu avec la colonisation du monde par l'Europe.

Au moyen-orient, le développement d'embryons de capitalisme au sein des empires arabes et ottoman s'appuya sur l'islam. Cette religion permettait de fédérer des tribus nomades afin de partir à la conquête de zones non désertiques où se sédentariser pour ensuite intégrer des villes dans les conquêtes. Mais comme le remarquait Marx, les particularités culturelles intriquées avec l'islam (rites alimentaires par exemple), issues des nomades du désert, constituaient un frein à son expansion en dehors de sa zone d'origine. Qui plus est le capitalisme ne décolla jamais dans cette région du monde où le développement des villes était trop faible.

En Europe, le capitalisme a poussé à l'intérieur-même de la société féodale. Mais le féodalisme n'a pas existé partout. Ainsi en Afrique, en orient, en Amérique, dans certaines parties de l'Asie, le féodalisme n'a pas existé. Le mode de production était soit l'esclavagisme, soit un mode de production primitif, voire même le nomadisme.

Il est bien évident que le développement du capitalisme, peu importe sur quoi il s'est fait, ne pouvait manquer d'entrer en contradiction avec la vielle société sur laquelle il poussait. Karl Marx remarquait que la bourgeoisie, contrairement aux autres classes dominantes des époques passées, devait constamment révolutionner tout le système de production. Le capitalisme boulverse donc tous les anciens rapports sociaux et économiques, dans un conflit violent. Même après la révolution, même une fois son système établi, la bourgeoisie ne cesse de révolutionner la société. La révolution bourgeoise est donc le début d'un ensemble de révolutions plus larges au sein de la société capitaliste elle-même.


Les révolutions bourgeoises classiques


Historiquement, le capitalisme s'est avant tout développé au sein-même du système féodal déclinant (qui n'était d'ailleurs lui-même qu'une régression temporaire et locale dans le développement inévitable des villes et par-dessus le marché, du capitalisme). La bourgeoisie a partout posé le jalon de nations en soutenant l'intégration économique, politique, culturelle et linguistique de vastes régions. Ainsi la bourgeoisie a effectué un long travail au sein-même du féodalisme alors-même qu'elle n'était pas la classe dominante. Sous l'aristocratie et la noblesse issue du féodalisme, la bourgeoisie des commerçants, les petits bourgeois, les petits producteurs, les banquiers, etc. commençaient à former une classe de plus en plus puissante, de plus en plus riche. La petite bourgeoisie est une classe qui se tranforme spontanément en grande bourgeoise par la concurrence. Ainsi s'est formée la grande bourgeoisie.

Tandis que la bourgeoisie affermissait les bases des premières nations capitalistes (France, Angleterre, Espagne, etc.), celles-ci se disputaient la prépondérance mondiale (commerciale et coloniale). Et pour cela elles se sont appuyées sur la monarchie par exemple. En retour le système acceptait des bourgeois au sein de l'état, par exemple Colbert sous Louis XIV.

Mais les règles du vieux système figé étaient innacceptables pour la bourgeoisie. La bourgeoisie vit du dépouillement d'autrui, du pillage qu'est le commerce et l'exploitation des esclaves et des premiers prolétaires. Or les règles figées, en particulier du vieux système féodal teinté de christianisme social, étaient un frein au développement de la bourgeoisie. Partout la bourgeoisie entra donc en conflit avec ces institutions, l'aristocratie, etc. et utilisa pour ça ses propres armes intellectuelles. Le protestantisme fut l'une de ces armes. S'inspirant de la religion des juifs, la bourgeoisie trouva satisfaction. Dans certains pays le poids de la paysannerie était encore très fort. Dans ces pays, les soutiens matériels de la puissance de l'aristocratie étaient tel que la bourgeoisie ne parvint pas à aménager les restes de système féodal à son compte. Ainsi en France le protestantisme fut chassé, alors qu'au contraire dans les pays comme l'Angleterre, où le capitalisme s'était développé bien plus vite, en particulier dans les campagnes, il n'eut aucune difficulté à s'imposer.

La bourgeoisie développa donc une palette d'idéologies différentes selon ses besoins par pays. Elle alla aussi chercher du côté de l'orient (franc-maçonnerie, "grand orient de France") pour teinter son propre discours libéral. La bourgeoisie développa aussi les sciences et la technique, puis elle s'appuya sur l'humanisme et les "lumières" afin de se légitimer en tant que classe présentant son intérêt comme étant l'intérêt général, et donc apte à diriger seule la société.

Le système idéal de la bourgeoisie est le système démocratique bourgeois, c'est à dire en fait une fausse démocratie, une dictature de la bourgeoisie, mais suffisament maquillée afin d'être acceptée comme légitime par toutes les autres classes de la société. Ce système s'est développé à divers degré selon la lutte des classes entre bourgeoisie et aristocratie.

Le conflit inévitable entre l'artisocratie et la bourgeoisie ne pouvait donc manquer ici ou là d'éclater en révolution. En 1642 éclata la première révolution anglaise, qui initia une succession de conflits et de compromis entre la bourgeoisie et l'aristocratie. En France la révolution de 1789 fut la première d'une sucesssion de conflits et de compromis jusqu'à l'instauration définitive d'un régime entièrement républicain et bourgeois en 1871.

La révolution bourgeoise peut s'appuyer sur d'autres couches de la population, prolétaires ou paysannes afin d'atteindre son objectif. Ainsi la révolution française donna la terre aux paysans, ce qui permit en fait le passage rapide au grand capitalisme moderne dans l'agriculture.

Dans certains pays il n'y eut tout simplement pas de révolution bourgeoise. Ainsi en Allemagne la bourgeoisie n'arriva jamais à s'imposer même lors d'évènements populaires majeurs où on aurait pu l'imaginer jouer un rôle bien plus poussé et déterminant pour le pays (par exemple la révolte contre Napoléon). Même les nazis, avec leur progressisme et leur libéralisme, continuèrent de collaborer avec l'aristocratie (prussienne notamment), tout en la méprisant. La raison est que la bourgeoisie y avait mené des luttes dès le début du capitalisme, et le cadre posé ainsi fut conservé bien que chahuté (avec notamment le développement du protestantisme en Allemagne, la guerre des paysans, etc.).

La révolution bourgeoise n'est donc pas un passage obligé quoiqu'il arrive assez souvent et spontanément à la suite du développement du capitalisme au sein d'un pays.

Une révolution bourgeoise peut aussi être suivie d'une révolution socialiste. Mais nous n'aborderons pas cet aspect ici. En fait, la révolution française elle-même se divise en deux périodes. La première, qu'on peut sans problème qualifier de révolution fasciste avec le coup d'état de 1789 qui instaure la première république bourgeoise. La seconde partie est la Terreur entre 1793 et 1794. Le régime de Robespierre était soutenu par les classes non-possédantes, il contenait des éléments embryonnaires de dictature du prolétariat. Il était à la fois dirigé contre les restes d'aristocratie que contre la bourgeoisie (du moins en partie). A l'époque trop peu développé, le mouvement socialiste ne pouvait se saisir de cette période historique pour qu'à la révolution bourgeoise de 1789 succède une révolution socialiste et prolétarienne.

Les révolutions fascistes sont typiquement des révolutions bourgeoises classiques. En réalité totues les révolutions bourgeoises arborèrent le faisceau, symbole de la république esclavagiste. Le "fascisme" au sens habituel (Italie et Allemagne) est doublé d'une répression féroce des mouvements communistes de l'époque (chose qui n'existait pas en 1789).


Les révolutions bourgeoises anti-impérialistes


Il existe un deuxième type de révolution bourgeoise, celles faites dans les nations opprimées par l'impérialisme. En effet, le développement des premiers pays capitalistes comme la France et l'Angleterre les ont fait atteindre, aux alentours des années 1880, le dernier stade du capitalisme, celui où la putréfaction naturelle de l'économie oblige les capitalistes à investir à l'étranger : l'impérialisme. A ce stade du capitalisme, les métropoles ne se contentent plus de régner par le commerce mondial avec les colonies. Les métropoles exportent désormais des capitaux, c'est à dire que de l'argent est investi à l'étranger depuis la métropole en direction des colonies et semi-colonies. Ces investissements provoquent, là où ils arrivent, un développement considérable du capitalisme.

Ce développement du capitalisme se fait par exemple au travers d'industries exportatrices. Par exemple les capitalistes français délocalisent une usine en Chine. C'est donc un investissement fait à l'étranger. Sur cette base, dans le pays où l'usine pousse, une bourgeoisie naît lentement. On l'appelle bourgeoisie compradore, parce qu'elle est soumise à l'impérialisme. Celle-ci se contente de régner sur des secteurs industriels, par exemple exportateurs, et généralement d'exécuter docilement la politique dictée par les impérialistes.

Mais cette bourgeoisie compradore finit par devenir si forte et si puissante qu'elle réclame son émancipation. Et pour cela elle en vient à mobiliser toutes les couches de la société pour combattre l'impérialisme, combattre aussi les éléments compradores traîtres qui refusent de secouer le joug impérialiste. Elle peut s'appuyer sur la paysannerie, la petite bourgeoisie, et même sur les propriétaires terriens si cela est nécessaire. C'est ce qu'on appelle une révolution nationale-démocratique bourgeoise. La bourgeoisie révolutionnaire a alors besoin d'affirmer sa propre nation, sa propre culture nationale, etc.

C'est ce qu'ont connu des pays comme l'Inde avec Gandhi, la Chine avec Mao, le Vietnam avec Hô Chi Minh, l'Iran avec la révolution islamique, le nationalisme arabe de Nasser, "l'islamo-socialisme" de Khaddafi, etc.

Cela ne veut pas dire qu'elle ne peut pas retomber dans les nasses de l'impérialisme, comme cela a finit par arriver en Chine par exemple, ou en Egypte. Mais cela signifie que cette bourgeoisie s'émancipe nationalement.

Mais il ne s'agit là en aucun cas d'une révolution socialiste. La révolution bourgeoise anti-impérialiste et la révolution socialiste sont deux choses différentes. Quand ces révolutions se sont faites, le prolétariat était encore très peu développé dans ces pays, et par conséquent la révolution socialiste ne pouvait venir de l'intérieur, ce qui fait qu'aucun de ces pays n'est devenu socialiste.

Il faut bien comprendre que mise à part la question anti-impérialiste, la révolution bourgeoise nationale-démocratique anti-impérialiste est une révolution bourgeoise classique. Cela n'empêche pas ces révolutions de se revendiquer du socialisme voire du marxisme. Ainsi le Vietnam, la Chine, Cuba, la Libye, etc. se sont réclamées du marxisme. L'objectif était d'entraîner ainsi toute la société dans la révolution, tout en obtenant le soutien des organisations communistes mondiales (pourtant en grande partie révisionnistes en fait, mais au final c'est même mieux pour eux). D'ailleurs les révolutions bourgeoises classiques elles-mêmes ne faisaient-elles pas autre chose en présentant l'intérêt des autres classes (paysannerie par exemple) comme celui de la bourgeoisie ? Durant la guerre des paysans en Allemagne par exemple, ou durant la révolution française. Pendant la révolution, « la classe dominante est davantage contrainte à présenter ses intérêts comme étant l'intérêt de tous les membres de la société. » Karl Marx

Mais il ne faut pas se leurrer, il ne s'agissait pas de socialisme. La propriété sociale des moyens de production n'y a pas été réalisée. Bien au contraire le révisionnisme y a été développé, et en particulier en Chine, qui en retour influença fortement les mouvements révisionnistes des pays impérialistes.

En revanche certains se dirigent tout droit vers le stade impérialiste, emboîtant le pas à l'Europe et aux Etats-Unis. Ainsi la Chine et l'Inde suivent un tel chemin, et sont même en bonne voie pour déclasser de très loin les premières métropoles impérialistes telle que la France, l'Angleterre, etc.

A l'heure actuelle il reste très peu de révolutions bourgeoises sauf éventuellement en Afrique. Il faut bien réaliser que l'impérialisme a déjà développé partout le capitalisme dans le monde, par ses investissements, et par conséquent il ne reste que quelques endroits du monde où des bourgeoisies pourraient en venir à faire une révolution bourgeoise d'émancipation nationale-démocratique contre l'impérialisme.


Les révolutions bourgeoises impérialistes


Il reste à évoquer un autre type de révolution bourgeoise. Celles faites par la bourgeoisie d'un pays impérialiste contre un autre pays. Les fameuses "révolutions colorées", qui en fait consistent pour un pays impérialiste, à se mêler de la politique intérieure d'un pays qu'elle a soumis ou qu'elle souhaite soumettre, en intervenant sur son processus politique. Par exemple la France et l'Angleterre ont agi ainsi en Afrique et au moyen orient pendant des décennies, en maintenant en place des régimes compradores, en étouffant les aspirations nationalistes des pays concernés, en les transformant en républiques bananières. Les états-unis n'agissent pas autrement lorsqu'ils interviennent dans les élections de pays, même capitalistes développés ou impérialistes comme la France, et cela est désormais bien connu. Ainsi l'éviction du général de Gaulle en 1968 ou encore le coup de pouce donné aux mouvements libéraux pour détruire l'URSS à la fin des années 1989 sont exactement du même ordre. Un exemple important est le soutien des états-unis à la révolution bourgeoise en URSS contre Staline entre 1953 et 1956 (c'est à dire la contre-révolution, anti-socialiste). Les exemples récents ne manquent pas quant aux méthodes concrètes qui accompagnent ces changements de régime.


Nous avons donc fait un tour assez rapide des différents types de révolution bourgeoise. Ce qui intéresse les marxistes aujourd'hui, ce ne sont pas les révolutions bourgeoises, mais les révolutions socialistes. La différence est bien sur énorme car seule la révolution socialiste conduit au socialisme... Et il ne suffit pas qu'une révolution bourgeoise se décrète socialiste pour l'être, aussi "démocratique" qu'elle soit, elle n'en reste pas moins une dictature de la bourgeoisie. Et par conséquent seule la révolution socialiste et la dictature du prolétariat mènent au socialisme.

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